Quartz, béryls, agates et améthystes...
Cette semaine se tenait à Damas la semaine de la francophonie, avec un certain nombre de manifestations culturelles en direction de ceux qui connaissent, pratiquent et aiment la langue française ; les services culturels de plusieurs ambassades ont coopéré pour organiser ces manifestations, et entre autres, une dictée digne de celles de Pivot il y a quelques années. C'était pour moi l'occasion rêvée de retrouver ce plaisir de la dictée ! Je vous vois déjà me dire que sur ce blog vous voyez parfois passer quelques fautes... Vous avez raison, je les vois moi aussi quand je reviens sur un article, et quand j'en ai le courage je les corrige, sinon je laisse tomber. Ecrire sur un blog n'a rien à voir avec la concentration requise par l'exercice de la dictée, où on passe finalement presque trop de temps à hésiter sur des choses qui, dans un autre contexte, n'auraient pas posé problème ! et c'est ainsi que l'on fait des erreurs "bêtes"... Cela a été mon cas mardi, dans cette salle grandiose du musée national de Damas où se tenait la dictée. Je n'avais pas emporté l'appareil photo, il faudra donc vous contenter d'imaginer une salle vaste, aux murs et aux plafonds couverts de boiseries peintes, et meublée de grands fauteuils en bois dont les assises et les dossiers étaient en brocart, ce tissu fait de fil de soie et d'or... (vérification faite, ce mot s'écrit bien avec un -t à la fin ! j'aurais sûrement mis un -d, ouf il n'était pas dans la dictée !)
Le texte, qui parlait d'une randonnée en montagne (dans les Pyrénées, les gypaètes étant de grands rapaces présents uniquement dans les Pyrénées), était écrit par la personne qui nous l'a lu, madame Elisabeth Horem, qui m'a gentiment autorisée à le publier ici. Elisabeth Horem est écrivain, vous pourrez en savoir plus sur elle en visitant ce lien : http://www.campiche.ch/pages/auteurs/Horem.html Merci, madame Horem, de votre gentillesse !
Alors, prêts pour cette lecture ?? C'est parti !
Le départ de la grande course annuelle fut donné sous un soleil radieux. Le parcours n’offrait de prime abord aucune difficulté, la journée commençait sous les meilleurs auspices, et d’aucuns s’étaient laissé tromper par l’apparence anodinede l’épreuve.
Jeunes et moins jeunes, en knickerbockers, godillots de marche et chaussettes garance, s’engagèrent avec entrain dans le sentier qui s’élevait entre les rhododendrons. Ils marchaient sans mot dire, chacun savourant dans son tréfonds les heureuses prémices de cette journée exceptionnelle.
À l’endroit où les conifères font place aux graminées, les plus jeunes firent demi-tour et revinrent au village, cueillant à l’envi gentianes, ancolies ou renoncules, et comptant les ocelles colorés aux ailes des papillons.
(Fin de la dictée des juniors)
Les vétérans poursuivirent l’ascension.
Sous l’égide éclairée d’un vieux guide, personnage haut en couleur au visage boucané par l’air des cimes, ils se sontplu à longer des névés immaculés, passant à leur insu près des gemmes tapies dans l’obscurité immémoriale de la roche : quartz, béryls, agates et améthystes.
Les cailloux d’un pierrier austère crissaient sous leurs souliers ferrés. Le soleil avait disparu. Certains en tirèrent mauvais augure. Un couple de gypaètes barbus tournoyait contre une paroi abrupte propre à dissuader les amateurs de varappe les plus aguerris.
On entendit comme un grondement sourd : cela venait du glacier qui depuis des siècles charrie tout ensemble dans son avancée inéluctable les roches fracassées et l’effroi des mortels. Puis un brouillard inopiné descendit sur eux comme un traquenard que leur aurait tendu la montagne. Mû par la frayeur, l’un des randonneurs fit volte-face, déclarant sans ambages qu’il n’irait pas plus loin. Il fut bientôt rejoint par d’autres qui, pour échapper plus vite à cet innommable cauchemar, s’étaient laissés glisser sur le derrière.
Cette année-là encore, les plus combatifs s’étaient approchés du sommet sans atteindre toutefois son éclat immarcescible que les nuages dérobaient à la vue comme une inaccessible perfection.
Alors ?? vous auriez fait combien de fautes, d'après vous ? Pour ma part, j'en ai fait de très bêtes (gentianes au singulier, pensant qu'on ne pouvait pas dire "des gentianes" mais seulement "de la gentiane"... c'est nul hein ?) mais j'ai aussi déjoué d'autres pièges, allant jusqu'à m'offrir le luxe de bien orthographier "immarcescible", mot dont je n'avais jamais soupçonné l'existence !! Au final, je m'en suis tirée avec neuf fautes, ce qui me semble beaucoup mais m'a quand même permis de finir à la deuxième place de ma catégorie, celle des français de langue maternelle, seniors... Oui, je sais, la dernière fois que j'ai fait ça, j'étais junior... Ca va, hein !
C'était un chouette moment, j'ai déjà hâte à l'année prochaine :-D